Sélectionner une page

Si je vous dis « New York », à quoi pensez-vous ?

Sans doute à la statue de la Liberté, Wall Street, l’Empire State Building, le 11 septembre, Central Park, les taxis jaunes ou bien Broadway. Oui, New York, c’est tout ça, et bien plus encore.

J’ai eu la chance immense d’y passer quelques jours récemment, et n’ai pas manqué de suivre les pas des millions de touristes qui arpentent chaque année les rues rectilignes de la ville.

Et puis… A l’étranger comme ailleurs, je garde toujours un œil sur les devantures des librairies, on ne se refait pas. Entre deux magasins de la 5ème Avenue se dresse, massif, un immense bâtiment dont l’architecture contraste avec les buildings alentours : une allure de temple grec, des colonnes et des statues, un escalier monumental et deux lions majestueux qui montent la garde d’un air bienveillant. C’est la fameuse NYPL, New York Public Library.

Des gens entrent et sortent en permanence. Certains sont assis sur les marches, absorbés par le flux de la circulation. Une mariée et ses demoiselles d’honneur posent au pied d’une jarre colossale. Un auteur attend le lecteur intéressé pour une discussion passionnée. Le lieu attire.

Selon mon guide, les deux lions s’appellent « Patience » et « Force d’Âme ». De bien nobles gardiens. A l’entrée, contrôle rapide des sacs. Puis on accède à un magnifique hall de marbre, tout en voûtes et colonnades. De grands lustres et candélabres donnent un reflet doré à la pierre blanche et aux bustes des alcôves. Ce jour-là, j’erre un peu au hasard dans le bâtiment, en suivant le mouvement des visiteurs.

Tout est immense. C’était le vœu des fondateurs. Au XIXème siècle, New York était rapidement devenue l’une des villes les plus importantes au monde, désormais puissante rivale de Paris et Londres. Un tel centre urbain se devait d’avoir une bibliothèque digne de ce nom. Le gouverneur Samuel J. Tilden (1814-1886) légua l’essentiel de sa fortune pour « établir et maintenir une bibliothèque et une salle de lecture dans la ville de New York ».

A l’époque, il existait déjà deux établissements d’importance, les bibliothèques Astor et Lenox, avec un accès très limité au public. La première avait été fondée grâce à la générosité de John Jacob Astor, immigrant allemand qui était à sa mort l’homme le plus riche d’Amérique. La seconde fut établie à partir de la collection personnelle de James Lenox, qui comprenait par exemple, le premier exemplaire de la Bible de Gutenberg à atteindre le Nouveau Monde. Les deux pataugeaient dans les difficultés financières.

Sous l’impulsion d’un homme de loi New-Yorkais, John Bigelow, il fut décidé que les différentes ressources, littéraires et financières, Astor, Lenox et Tilden, seraient combinées pour former une nouvelle entité : The New York Public Library (NYPL). L’accord fut signé le 23 mai 1895 et salué comme un exemple sans précédent de philanthropie privée pour le bien public.

Il fallut 16 ans pour que l’ensemble du bâtiment soit érigé et inauguré, le 23 mai 1911. Le succès fut immédiat : entre 30000 et 50000 visiteurs se présentèrent le lendemain, jour de l’ouverture. L’un des premiers documents empruntés fut une étude sur Friedrich Nietzsche et Léon Tolstoï. Le lecteur adressa sa demande à 9h08 le matin et reçut le livre seulement six minutes plus tard. Une prouesse pour une époque sans informatique.

Andrew Carnegie contribua également au projet, notamment aux 39 annexes disséminées dans la ville, de quoi amener la culture à chaque coin de rue.

Rapidement, la New York Public Library devint un élément essentiel du tissu intellectuel de la vie américaine. Parmi ses premiers bénéficiaires étaient les immigrants récemment arrivés, que la bibliothèque mit en contact avec la littérature et l’histoire de leur nouveau pays, mais aussi le patrimoine amené d’Europe ou d’ailleurs.

Aujourd’hui, la bibliothèque compte 92 sites dispersés dans Manhattan, le Bronx et Staten Island (les deux autres quartiers de New York, Brooklyn et le Queens, ayant mis en place un système séparé avant la consolidation de la ville). Son fond est très riche, plus de 51 millions de documents divers, livres, manuscrits, notes, lettres, autographes (notamment de grands auteurs américains), cartes et photographies. La consultation y est rapide et facile, grâce à une organisation efficace encore améliorée par l’avènement de l’ère numérique. En bref, un temple des lumières et de la connaissance.

Dans les étages, le bois habille la pierre, les peintures monumentales ornent les halls et le silence envahit les immenses salles de lecture. Je m’assois quelques instants devant un écran, et m’imagine en quête du savoir (j’ai l’air sérieux sur la photo, pas vrai ? C’est pour de faux !) Encore quelques minutes à admirer (envier ?) les étudiants et les chercheurs concentrés, un petit tour à la boutique (pour acheter le mug NYPL) et je retrouve l’air extérieur.

 

Mais la bibliothèque n’a pas dit son dernier mot ni livré toutes ses ressources…

Derrière le bâtiment se trouve l’un des endroits les plus agréables de Manhattan, Bryant Park. Tout y est propice à la lecture : de la verdure, des chaises, de quoi boire ou manger sur le pouce, des livres et des magazines en libre service. Les arbres et les buildings semblent veiller sur le lieu et étouffent quelque peu le bruit de la circulation. Les étudiants et les promeneurs s’y reposent, bouquinent ou discutent au soleil.

Ce samedi-là pourtant, le calme n’est pas de mise. Les New-Yorkais insatisfaits s’y sont donné rendez-vous pour une manifestation haute en couleur contre les agissements de leur président. Les pancartes rivalisent d’humour cynique dans une ambiance qui reste bon enfant. Plus tard, le cortège remontera la 5ème Avenue jusqu’à la Trump Tower sous l’œil impassible de cohortes de policiers…

Mon tour à New York est terminé. Peut-on dire que j’ai gardé le meilleur pour la fin ? Non, puisque, pour l’Européenne que je suis, tout est incroyable dans cette ville. Une chose est sûre cependant. Le café servi dans un mug de la New York Public Library a un petit goût littéraire incomparable !

Pour en savoir plus (et pour les anglophones) : https://www.nypl.org/help/about-nypl/history (source de cet article pour la partie historique)

Avez-vous déjà visité ce genre de bibliothèques monumentales ? N’hésitez pas à partager vos expériences dans les commentaires, histoire de nous faire rêver !